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"Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse, que son visage s'illumine pour nous ; et ton chemin sera connu sur la terre, ton salut, parmi toutes les nations. Que les peuples, Dieu, te rendent grâce ; qu'ils te rendent grâce tous ensemble !" (Psaume 67)

mercredi 30 mars 2016

Comment garder la paix intérieure ?

par Calliste et Ignace Xanthopouloi


Celui qui commence à se consacrer à l'hésychia* doit passer le jour et la nuit voué à cinq oeuvres par lesquelles il sert Dieu:

1) Dans la prière, c'est-à-dire le souvenir du Seigneur Jésus Christ  ("Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi pêcheur") continuellement introduit dans le coeur sans nulle pensée et imagination étrangères. La prière se découvre dans la pure humilité, à l'intérieur de sa chambre, à travers les jeûnes et les veilles. 

2) Dans la psalmodie*

3) Dans la lecture du Psautier sacré, de l'Apôtre (lettres de Paul), et des Saints Evangiles, des écrits des saints Pères théophores*, et particulièrement des chapitres sur la prière, la sobriété et la vigilance.

3) Quant aux autres enseignements divin de l'Esprit, dans le souvenir des péchés qui met le coeur en peine, dans la méditation du Jugement de Dieu, ou de la mort, ou dans la réjouissance et d'autres sujets semblables.

4) Et dans le petit travail des mains, pour museler l'acédie*.

Puis de nouveau se remettre à la prière quand bien même la chose serait dure, jusqu'à ce que l'intelligence s'habitue à rejeter aisément sa propre agitation en étant tout entière occupée du Seigneur Jésus Christ, par le souvenir constant, par continuellement tendu vers le trésor intérieur - lieu secret du coeur - et par un enracinement profond.


*Hésychia: tranquillité,  silence, repos, douceur, paix de l'âme, paix intérieure.
*Psalmodie: chant des Psaumes
*Théophore: porteur de Dieu.
*Acédie: perte de goût pour la prière, dégout des choses spirituelle, lassitude.




CALLISTE ET IGNACE XANTHOPOULOI, Centurie spirituelle, Philocalie des Pères neptiques, Bellefontaine, 2005, p. 583.

vendredi 25 mars 2016

"Ils prirent le corps de Jésus et l'ensevelirent" (Jn19,40)

par Epiphane de Salamine




Un grand silence règne aujourd'hui sur la terre, un grand silence et une grande solitude. Un grand silence parce que le Roi dort. La terre a tremblé et s'est calmée parce que Dieu s'est endormi dans la chair et qu'il est allé réveiller ceux qui dormaient depuis des siècles. Dieu est mort dans la chair et les enfers ont tressailli. Dieu s'est en endormi pour peu de temps et il a réveillé du sommeil ceux qui séjournaient dans les enfers.

Il va chercher Adam, notre premier père, la brebis perdue. Il veut aller visiter tous ceux qui sont assis dans les ténèbres et à l'ombre de la mort. Il va, pour délivrer de leurs douleurs Adam dans ses liens et Eve, captive avec lui. Descendons donc avec lui.
Là où se trouve Adam, le premier père. 
Là où se trouve Abel, le premier mort et comme premier berger juste, figure du meurtre injuste du Christ berger. 
Là où se trouve Noé, figure du Christ constructeur de la grande arche de Dieu qu'est l'Eglise.
Là où se trouve Abraham, le père du Christ, le sacrificateur qui offrit à Dieu par le glaive un sacrifice mortel sans mort.
Là où demeure Moïse, dans les ténèbres, lui qui jadis a séjourné dans les ténèbres lumineuses de l'Arche de Dieu.
Là où se trouve Daniel dans la fosse de l'enfer, lui qui jadis a séjourné sur la terre dans la fosse aux lions.
Là se trouve Jérémie dans la fosse de boue, dans l'abîme du séjour des morts, dans la corruption de la mort.
Là se trouve Jonas, dans le monstre capable de contenir le monde. Il s'écrie "Du ventre de l'enfer, entend ma supplication, écoute mon cri ! (Jo 2,3).

Mais comme par son avénement le Seigneur voulait pénétrer dans les lieux les plus inférieurs, Adam, en tant que premier père et premier créé de tous les hommes, entendit le premier les pas du Seigneur qui venait vers les prisonniers. "J'entends les pas de quelqu'un qui vient vers nous".
Le Seigneur entra tenant les armes de la victorieuse croix. Et lui ayant saisi la main, le Christ lui dit: "Réveille-toi, toi qui dors, relève-toi d'entre les morts et le Christ t'éclairera. (Eph 5,14) Lève-toi et partons d'ici, et allons de la douleur à la joie, de la prison à la Jérusalem céleste, des chaînes à la liberté, de la captivité aux délices du paradis, de la terre au ciel. Mon Père céleste attend la brebis perdue ; un trône de chérubin est prêt, les porteurs sont debout et attendent ; la salle des noces est préparée ; les tentes et les demeures éternelles sont ornées ; les trésors de tout bien sont ouverts ; le Royaume des Cieux qui existait avant tous les siècles vous attend."

EPIPHANE DE SALAMINE: Cité par: BOURGUET (D.), L'Evangile médité par les Pères : Jean, Olivétan, 2010, p. 225-227.


Epiphane de Salamine: il nait dans une famille juive de la région de Gaza en 315, puis se converti au christianisme. A l'âge de 20 ans, maitrisant le grec, le syriaque et le copte, il fonde un monastère à Besanduce.  En 367, il est fait évêque de Salamine et métropolite de Chypre. 

"Là ils le crucifièrent"

 (Mc 15,24 7 / Mt 27,35 / Lc 23,33 / Jn 19,18)
Par Isaac le Syrien


Pleurez sur vous et sur vous enfants (Luc 23,28)

Seigneur Jésus-Christ, notre Seigneur, qui a pleuré Lazare
et versé sur lui les larmes de la tristesse et de la compassion,
reçois les larmes de mon amertume.
Par tes plaies guéris mes plaies !
Par ton song purife mon sang !
Et porte dans mon corps le parfum de son corps vivifiant.

Que le fiel dont les ennemis t'ont abreuvé
change en douceur dans mon âme l'amertume que m'a versée l'Adversaire.
Que ton corps tendu sur l'arbre de la croix
déploie vers toi mon intelligence écrasée par les démons.
Que ta tête inclinée sur la croix
relève ma tête que les ennemis ont outragée.
Que tes mains saintes clouées par les infidèles me relèvent du gouffre de la perdition et me ramène à toi, comme l'a promis ta bouche.
Que ton visage qui reçut des méchants les gifles et les crachats, éclaire mon visage qu'ont souillé les injustices.
Que ton âme que sur la croix tu as soumise à ton Père,
me conduise à toi dans ta grâce.

Je n'ai ni coeur souffrant pour partir à ta recherche,
ni repentir, ni tendresse,
rien de ce qui ramène à leur héritage les enfants.
Maître, je n'ai pas de larmes pour te prier.
Mon intelligence est enténébrée par les choses de cette vie,
et n'a pas la force de tendre vers toi dans la douleur.
Mon coeur est froid sous le nombre des tentations,
et les larmes de l'amour pour toi ne peuvent le réchauffer.
Mais toi, Seigneur Jésus-Christ mon Dieu, trésor des biens,
donne-moi le repentir total et le coeur en peine,
pour que de toute mon âme je sorte à ta recherche.
Car sans toi je serai privé de tout bien.

Ô Dieu bon, donne-moi ta grâce !
Que le Père qui dans l'éternité hors du temps t'a engendré dans son sein,
renouvelle en moi les forme de ton image.

Je t'ai abandonné: ne m'abandonne pas !
Je me suis éloigné de toi: sors à ma recherche !
Conduis-moi dans ton pâturage,
compte-moi avec les brebis de ton troupeau élu.
Avec elles nourris-moi de l'herbe verte de tes mystères divins
dont le coeur pur est la demeure,
ce coeur qui porte en lui la splendeur de tes révélations,
la consolation et la douceur de ceux qui se sont donné de la peine 
pour toi dans les tourments et les outrages.
Puissions-nous être dignes d'une telle splendeur,
par ta grâce et ton amour de l'homme,
ô notre Sauveur Jésus-Christ, dans les siècles des siècles. Amen.

ISAAC LE SYRIEN, Oeuvres spirituelles, DDB, 1981, p. 67ss. Cité par: BOURGUET (D.), L'Evangile médité par les Pères : Luc, Olivétan, 2008, p. 224-225.

lundi 21 mars 2016

Le Saint Esprit: l'huile qui maintient nos lampes allumées


par Séraphim de Sarov



"Les vierges sages, avec leurs lampes, prirent de l'huile" 
(Matthieu 25, 1-13)

Dans la parabole des vierges sages et des vierges folles, quand ces dernières manquèrent d'huile, il leur fut dit "allez en acheter au marché". Mais en revenant, elles trouvèrent la porte de la chambre nuptiale close et ne purent entrer. Certains estiment que le manque d'huile chez les vierges folles symbolise l'insuffisance d'actions vertueuses faites dans le courant de leur vie. Une telle interprétation n'est pas juste. 
Moi, misérable, je pense qu'il leur manquait justement le Saint-Esprit de Dieu. Tout en pratiquant des vertus, ces vierges, spirituellement ignorantes, croyaient que la vie chrétienne consistait en ces pratiques. Nous avons agi de façon vertueuse, nous avons fait oeuvre pie, pensaient-elles sans se soucier si, oui ou non, elles avaient reçu la grâce du Saint-Esprit. 
De ce genre de vie, basé uniquement sur la pratique des vertus morales, sans un examen minutieux pour savoir si elle nous apportent et en quelle quantité, la grâce de l'Esprit de Dieu, il a été dit dans les livres patristiques: "Certaines voies qui paraissent bonnes au début conduisent à l'abîme infernal".
En parlant de ces vierges, Antoine le Grand, dit, dans ses Epîtres aux moines: "Beaucoup de moines et de vierges ignorent complètement la différence qui existe entre les trois volontés agissant à l'intérieur de l'homme. La première est la volonté de Dieu, parfaite et salvatrice ; la deuxième est notre volonté propre, humaine, qui, en soi n'est ni néfaste ni salvatrice ; tandis que la troisième, diabolique, est tout à fait néfaste. C'est cette troisième volonté ennemie qui oblige l'homme soit à ne pas pratiquer la vertu du tout, soit à la pratiquer par vanité, ou uniquement pour le 'bien', et non pour le Christ.
Quant à la première volonté, celle de Dieu, salvatrice, elle consiste à nous apprendre à faire le bien uniquement dans le but d'acquérir le Saint Esprit, trésor éternel, inépuisable, que Rien au monde n'est digne d'égaler."
C'est justement la grâce du Saint Esprit, symbolisée par l'huile qui faisait défaut aux vierges folles. Elle sont appelées "folles" parce qu'elle ne se souciaient pas du fruit indispensable de la vertu qui est la grâce de l'Esprit Saint, sans laquelle personne ne peut être sauvé, car selon ce que dit l'antienne avant l'Evangile des Matines, "toute âme est vivifiée par le Saint Esprit afin d'être illuminée par le mystère sacré de l'unité trinitaire".
Le Saint Esprit lui-même vient habiter nos âmes, et cette résidence en nous du Tout-Puissant, la coexistence en nous de son unité trinitaire avec notre esprit ne nous est donnée qu'à condition de travailler par tous les moyens en notre pouvoir à l'obtention de cet Esprit Saint qui prépare en nous un lieu digne de cette rencontre, selon la parole immuable de Dieu: "Je viendrai et j'habiterai en eux, et je serai leur Dieu et ils seront mon peuple" (Lv 26,11-12 ; 2 Co 6,16).
C'est cela l'huile que les vierges sages avaient dans leurs lampes, huile capable de brûler longtemps, haut et clair, permettant d'attendre l'arrivée, à minuit, de l'époux et l'entrée, avec lui, dans la chambre nuptiale de la joie éternelle.

SERAPHIM DE SAROV, Entretien avec Motovilov, DDB, 1995, p.158ss.


Saint Séraphim de Sarov: né à Koursk (Russie) en 1754,  il entre comme novice à 19ans au monastère de Sarov où il sera ordonné diacre, puis prêtre.
En 1790, il se retire en solitude dans la forêt où il vit en ermite dans la prière et la lecture de la Bible (il lisait notamment le Nouveau Testament en entier chaque semaine). Il restait également de nombreux jours en prière sur un rocher. Un jour il est agressé par des voleurs dans son ermitage, déçus de ne rien trouver à voler, ils le frappent et le laissent pour mort. Arrêtés, Séraphim leur pardonnait et demanda à ce qu'ils ne soient pas punis. Sa notoriété se répand, et il reçoit de plus en plus de visites, attirées par sa sagesse et son don de clairvoyance.
La nuit du 1er au 2 janvier, alors que le temps liturgique est celui de Noël, on l'entend chanter les cantiques de la Résurrection. Il meurt cette même nuit.